La chronique “ciné” d’El Cojano, alias Le Cojean (eh oui, comme la chaîne de resto…rants ! )
The Monuments Men, et l’art dans tout ça ?
L’art et la guerre : tels sont les deux thèmes principaux de The Monuments Men, le dernier film de George Clonney. Deux thèmes propices aux sensations, pour l’un ; et aux émotions, pour l’autre. Or face à l’écran, on ne ressent qu’amusement et agacement.
Le film amuse parce que loin de traiter d’art, il s’articule en réalité comme une petite comédie naïve. Le scénario enchaîne boutades, piques et autres blagounettes entre les protagonistes sans réellement creuser son sujet, à savoir retrouver et restituer les chefs-d’œuvre volés par les Nazis pendant la Seconde Guerre Mondiale. Si l’escouade (la vraie) envoyée par le général Eisenhower en 1944, était composée de conservateurs, d’artistes, d’architectes et d’historiens de l’art, celle reconstituée par George Clooney est un groupe de vieux copains qui voulaient faire un film ensemble pour se marrer. Un prétexte qui nuit énormément au scénario.
Bien sûr, les œuvres d’art survivent en toile de fond, parmi lesquelles la Madone de Bruges de Michel Ange, et le Retable de Gand de Jan Van Eyck. Deux œuvres que les héros recherchent on ne sait pas vraiment comment à travers les campagnes belges et allemandes. C’est bien là son problème : le film n’aborde presque jamais les difficultés liées à la recherche d’objets volés. À la place, il s’étale sur les personnages et leurs relations. À tel point qu’au moment où, après des mois de galère (on le suppose), l’enquête est résolue, les scènes ne sont pas émouvantes, mais drôles, parce que Bill Murray lance une pique à son compère.
Jan Van Eyck, Le Retable de Gand ou L’Adoration de l’Agneau mystique, 1432
Le film agace par son patriotisme et ses bons sentiments. Il agace par ses incessantes et irritantes voix off et lectures de lettres d’adieu bercées par une musique digne d’un mauvais épisode de Dora l’Exploratrice. Il agace par le personnage de Cate Blanchett, une résistance française, qui parle français avec un accent américain, et anglais avec un accent allemand. Il agace par ce drapeau américain qui vient berner les Russes arrivés trop tard pour récupérer les derniers tableaux. Pis, il agace par son inexactitude car si les Américains ont en effet recherché les œuvres ravies par les Nazis, ils n’avaient pas réellement l’intention de toutes les rendre à leurs propriétaires, et des dizaines de milliers manquent encore à l’appel aujourd’hui.
En définitive, l’attitude de George Clooney, empreint de patriotisme et de bons sentiments, dessert un sujet pourtant favorable à la création d’un chef-d’œuvre cinématographique. En préférant brosser le portrait de vieux copains devenus soldats plutôt que le paysage mutilé de la recherche durant la guerre, le réalisateur signe un film pauvre et naïf où ne transpire que son envie de plaire avec de belles intentions.
Georges Clooney (à gauche) et Jean Dujardin (à droite), sur le tournage du film
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