EXPOS-RouenBrou

Brou vs. Rouen : le temps des cathédrales

De l’architecture en peinture, un défi dur à relever. Et pourtant Brou et Rouen l’ont fait.

 

Au vu de leur partenariat officiel, de leur proximité géographique, de leur sujet mutuel, et des artistes qu’elles regroupent, il serait a priori logique d’opposer l’exposition du musée des Beaux-Arts de Lyon à celle que propose le monastère royal de Brou (Bourg-en-Bresse). Toutes deux instruisent la région Rhônes-Alpes, toutes deux traitent, d’un commun accord, de « peinture troubadour » et de Pierre Revoil, artiste représentatif de ce courant français du XIXème siècle. Et pourtant, l’approche de Brou recoupe la démarche du musée des Beaux-Arts de Rouen, qui retrace actuellement l’histoire du gothique en peinture.

 

Ogives en peinture

L’objectif pour Brou comme pour Rouen n’est autre que de montrer des représentations de monuments gothiques. Or, l’un des éléments caractéristiques du gothique, c’est l’ogive, une sorte d’arc se terminant en pointe. Un motif que l’on retrouve dans les deux parcours d’exposition. À la série d’églises de Monet et de Junking, au bossu de Victor Hugo et au stryge de Marc Chagall, au mobilier « à la cathédrale », à « la cathédrale » d’Auguste Rodin confrontées en Normandie s’opposent le Roméo poignardé et la Juliette empoisonnée du peintre lyonnais Fleury François Richard (comment renverser un processus narratif ? ), des topoi amoureux campés dans des chapelles délabrées, des peintures de cloîtres, et quelques vues du monastère royal de Brou lui-même.

 

Fleury François Richard, Le petit chaperon rouge, vers 1820

                           Fleury François Richard, Le petit chaperon rouge, vers 1820

 

Salles ou étages : deux sur deux

Une mise en abyme qui met la monastère en valeur. Réparties sur deux étages, les 120 pièces retenues par Brou baignent dans leur jus, le monastère étant lui-même un exemple d’architecture gothique. Quoi de plus vivant, en effet, qu’apercevoir un pan de mur en pierre sous les supports de cartels en carton ? Quant au commissariat (équipe qui conçoit une exposition) rouennais, lui aussi a divisé son espace en deux parties, séparées par une cour intérieure. Or cette contemplation des sculptures et du bassin centraux constitue une pause fort agréable au milieu des 180 chefs-d’œuvres réunis.

Sisley, Musée des Beaux-Arts, Rouen                                                           Cour intérieure du MBA de Rouen

 

Quels gothiques ?

Proportionnalité oblige : les bornes chronologiques de l’expo « Cathédrales », à Rouen sont plus espacées que le spectre temporel couvert par Brou. Le musée est plus grand, certes mais aussi et surtout la ville, qui a inspiré bon nombre d’artistes français et étrangers. C’est pourquoi tandis que Brou met l’accent sur le patrimoine médiéval comme source d’inspiration du gothique, Rouen salue les romantiques, les impressionnistes, les symbolistes et quelques contemporains. Un réflexe bien naturel du côté de la manifestation bordant la commune de Bourg-en-Bresse puisque qu’elle se pense davantage comme la prolongation du “Style troubadour” (1971), exposition fondatrice du monastère de Brou. Ainsi se raccrochent le wagons entre Lyon et ce petit musée municipal, autour du genre artistique qu’incarnent François Richard Fleury, Pierre Revoil, et Jean Auguste Dominique Ingres, dans une moindre mesure. Pour recontrer Constable, Turner, Hugo, Moreau, Renoir, entre autres, c’est en Normandie qu’il faut aller.

Claude Monet, Cathédrale de Rouen, 1894

Claude Monet, Cathédrale de Rouen, 1894

 

« Cathédrales 1789-1914 : Un mythe moderne », du 12 avril au 31 août, musée des Beaux-Arts de Rouen

« L’Invention du Passé, Gothique mon amour… 1802-1830 », du 19 avril au 21 septembre, musée du monastère royal de Brou