Suite et fin de ce recensement, plus ou moins exhaustif, des musées de peintres dispatchés aux quatre coins de l’Hexagone.
19) Musée Eugène Boudin, Honfleur (BASSE-NORMANDIE)
Bon d’accord, il n’est pas exclusivement dédié à Eugène Boudin (1824-1898), dont le plus gros des œuvres résident, en réalité, au musée des Beaux-Arts André Malraux, dit le MuMa (Le Havre). Alors pourquoi en reçoit-il le nom, dès 1960 ? Peut-être parce qu’il est basé à Honfleur, ville natale du peintre ; ou bien plutôt parce que tel était le souhait de Louis-Alexandre Dubourg, soucieux de rendre hommage à celui qui avait soutenu son projet depuis le début. Ainsi est né le musée « destiné à donner aux Honfleurais le goût des Beaux-Arts ». D’extension en extension, l’institution finit par créer deux cabinets réservés à l’oeuvre de son égérie. On y trouve notamment les marines qu’admirait tant Charles Baudelaire. « Chose assez curieuse, il ne m’arriva pas une seule fois, devant ces magies liquides ou aériennes, de me plaindre (…). » (Curiosités Esthétiques Salon de 1859. VIII. Le Paysage.)
20) Musée Renoir, Cagnes-sur-Mer (ALPES-MARITIMES)
Pierre-Auguste Renoir (1841-1919) découvre Cagnes-sur-Mer, en 1903. Condamné à l’isolement par ses rhumatismes, il y achète le « Domaine des Collettes », quatre ans plus tard. Sur cette propriété de trois hectares, déjà peuplée d’oliviers et d’orangers, il fait bâtir une maison de style néo-provençal flanquée de deux ateliers. L’artiste y habitera et y créera entouré de sa femme Aline et de leurs trois enfants, Pierre, Jean, et Claude, jusqu’à sa disparition, à l’âge de 78 ans. De là, la « période cagnoise » qu’on lui reconnaît aujourd’hui, utilme période où il s’initie à la sculpture sous la double tutelle de Richard Guino et de Louis Morel.
Après sa mort, le domaine tombe entre les mains de son fils Claude. En 1960, la ville de Cagnes-sur-Mer le transforme en un musée d’une douzaine de pièces, veillant à tout laisser « en l’état ». Jusqu’à ce que les œuvres de contemporains viennent en compléter la collection permanente. Aux quatorze toiles, sculptures et meubles originaux, viennent finalement se frotter des Maillol, des Dufy, et des Bonnard, entre autres. Le parc est ouvert au public, de même que la cuisine familiale, depuis 2003. Ainsi perdure le souvenir du maître impressionniste.
À VENIR : une exposition de documents (photos, archives, lettres…) récemment acquis par la ville de Cagnes-sur-Mer lors d’une vente aux enchères exceptionnelle à New York. Printemps 2014.
21) Musée national Fernand Léger, Biot (ALPES-MARITIMES)
Quelques mois avant sa mort, Fernand Léger (1881-1955) acquiert le mas St André, juste au pied du village de Biot. Sur ce terrain horticole, Nadia Léger, sa veuve, et Georges Bauquier, l’un de ses plus fervents collaborateurs, décident de fonder un musée, à la fois pour lui rendre hommage et familiariser le public à son oeuvre. André Svetchine en signe le design, tandis que le parc est confié au paysagiste Henri Fisch. Pas de doute quant à l’identité du lieu. La façade arbore une immense mosaïque qu’avait imaginée Léger pour la décoration du stade de Hanovre. Un rêve désormais devenu réalité. À l’intérieur, une collection de trois cents œuvres inaugurées le 13 mai 1960, sous le regard bienveillant de Picasso, Braque et Chagall, entre autres célébrités. Malgré un dédoublement de sa surface en 1987, le musée, devenu national en 1969, reste monographique. Un peu de logique dans ce monde d’incohérences !
À VOIR : « Fernand Léger : reconstruire le réel », du 1er mars au 2 juin (puis du 20 juin au 22 septembre au musée des beaux-arts de Nantes)
22) Musée Marc Chagall, Nice (ALPES-MARITIMES)
L’exception qui concerne la règle. Marc Chagall (1887-1985) n’est pas français, mais russe. Marc Chagall n’a pas vu le jour, ni même vécu à Nice. Naturalisé français, il mort à Saint-Paul de Vence, c’est-à-dire bien assez près pour l’inclure dans notre liste. Son heure n’était même pas venue quand André Malraux, alors Ministre de la Culture, ordonna la construction d’un musée où conserver son « Message Biblique ». Le peintre suit avec intérêt le projet au point de commander un auditorium orné de vitraux et de mosaïques. Une commande qui bouleverse le parcours arrêté par les architectes. L’inauguration se déroule en 1973, en présence de l’intéressé.
Sa disparition donne lieu à une dation de 300 œuvres ; les héritiers du peintre participant ensuite à l’enrichissement des collections. Nonobstant divers travaux de modernisation, l’institution est maintenue « dans son jus » pour la plus grande joie des 200 000 visiteurs qui y transitent chaque année.
À VOIR : « Natacha Lesueur. Ombres blanches », du 22 février au 19 mai.
23) Musée Bonnard, Le Cannet (ALPES-MARITIMES)
Le Cannet, ses paysages, sa lumière ont été une été une source d’inspiration inépuisable pour Pierre Bonnard (1867-1947). Il y séjourne de 1922 à 1947, avant d’acquérir, en 1926, « Le Bosquet », une maison nichée sur les hauteurs de la ville et où il finira ses jours. Trois cents œuvres sont nées de cette dernière période. Une productivité qui justifie l’emplacement du « musée de France » qui ouvre, sous son nom, en 2011. Contre toute attente, l’institution s’établit non dans la demeure du peintre, mais au sein de la villa Saint-Vianney qu’ont déjà visité près de 120 000 personnes. Un score honorable au bout de deux ans d’existence.
À VOIR : « Bonnard, Vuillard & Les Nabis. L’Œil d’un collectionneur – 2ème volet », du 16 mars au 15 juin.
24) Musée Jean Cocteau, Menton (ALPES-MARITIMES)
« [Sa] vie, c’est d’être fan ». Fasciné par la polyvalence de Jean Cocteau (1889-1963), le célèbre homme d’affaires Séverin Wunderman fonde un premier musée dédié au peintre à Irvine, en Californie. Voyant sa collection grandir au fil du temps, il caresse tout doucement l’espoir de rendre à la France une partie de son patrimoine. Quoi de mieux pour ce faire, qu’implanter son trésor à Menton, la ville où Cocteau avait lui-même eu l’intention de monter son musée ? L’acte de donation est signé en 2005, le chantier entamé dans la foulée. La première pierre est posée, le 29 décembre 2008, lors d’une cérémonie à laquelle feu Wunderman ne peut malheureusement assister. Les 1 800 pièces réunies sont montrées au public, en novembre 2011, et continuent d’attirer des milliers de visiteurs chaque année.
À VENIR : la collection sur le site de Videomuseum, un réseau de musées et d’organismes qui fédère actuellement 60 collections et soit 25 000 artistes, 300 000 oeuvres et 200 000 images.
À VOIR AUSSI : La Maison Cocteau, Milly-la-Forêt « C’est la maison qui m’attendait. (…) J’y retrouve les souvenirs de campagnes anciennes où je rêvais de Paris comme je rêvais plus tard, à Paris, de prendre la fuite. L’eau des douves et le soleil peignent sur les parois de ma chambre leurs faux marbres mobiles. Le printemps jubile partout. » Jean Cocteau – « La Difficulté d’être ».
25) Atelier Cézanne, Aix-en-Provence (ALPES-MARITIMES)
Une étagère interminable, une table, un escabeau, un chevalet, un divan, deux-trois chaises… tels sont les éléments constitutifs de l’atelier de Paul Cézanne (1839-1906), les modèles de ses natures mortes. Un atelier resté intact et accessible au public depuis les années 1950. Quinze ans après la disparition du peintre, emporté par une pleurésie, Marcel Provence rachète le studio en question afin d’y sauvegarder « un patrimoine précieux », à savoir quelques faïences locales, deux pots à gingembre et à olives, un vase, un compotier, une assiette, un verre, une bouteille de rhum, trois crânes, un plâtre attribué au sculpteur François Duquesnoy. « Les objets se pénètrent entre eux, ils ne cessent pas de vivre. Ils se répandent insensiblement autour d’eux par d’intimes reflets, comme nous par nos regards et par nos paroles… » Ainsi parlait Cézanne de son univers inanimé, un univers que pénètre le Doctor Albert Barnes, en 1925 ; et Marilyn Monroe, en 1955. La preuve dans le livre d’or: « a wonderful visit », d’après la pin-up américaine.
26) Musée Victor Charreton, Bourgoin-Jallieu (RHÔNES-ALPES)
Ce n’est pas tant un musée pour qu’un musée de Victor Charreton (1864-1936). Créé en 1929 à l’initiative du peintre, l’établissement ouvre ses portes en 1933, dans l’ancienne chapelle des Antonins (1503) et hôtel-Dieu (XVIII eme siècle). Trois niveaux pour deux grands thèmes : le textile, atout économique majeur de la région ; et l’œuvre du paysagiste soi-disant post-impressionniste, Victor Charreton. Deux thèmes mis en valeur par des projections, de films, de photos, des documentaires sur le tissage en entreprise, par exemple, ainsi que des expositions temporaires censées porter un éclairage sur le fonds permanent du musée. Petit plus : l’entrée est gratuite, depuis 2008.
À VOIR : « Alfred Bellet du Poisat (1823-1883) peintre paysagiste. », du 28 mars au 24 août.