On dirait bien. À partir du 21 janvier, l’aéroport de Paris-Charles-de-Gaulle expose 35 œuvres de Pablo Picasso. Parfaitement, Picasso ! Pendant ce temps, la SNCF peaufine sa programmation culturelle de l’année. Les hubs urbains sont en train de devenir un tremplin pour l’art.
par Sarah Belmont
1 Ils abritent de plus en plus d’expos.
Entre pianos et panneaux publicitaires, des œuvres d’art ? Pourquoi pas ? « Il y a toujours eu des animations dans les gares ». Pour Patrick Ropert, directeur général de SNCF Gares & Connexions, le phénomène n’est pas nouveau, mais il s’agissait de l’accentuer. Depuis deux ans, les gares de France accueillent une centaine d’événements artistiques, destinés à quelque 10 millions de voyageurs-visiteurs par jour. À ce train-là, la SNCF pourrait prétendre au titre de plus grand musée du monde. Sur 80 millions de passagers annuels, 400 000 foulent les 250m2 de L’Espace Musées, situé au Terminal 2E de l’aéroport CDG. Ce nombre devrait bientôt doubler, quand ladite galerie fermera ses portes à 19h au lieu de 13h. « Nous rejoindrons alors le Top 10 des musées les plus fréquentés, en termes d’expositions temporaires », espère son fondateur Francis Briest.
2 Des œuvres originales y sont présentées.
Adieu les copies ! Bonjour les originaux ! Les œuvres exposées, gratuitement, dans cet espace unique au monde, proviennent des fonds de musées nationaux. Auguste Rodin, le père de la sculpture moderne, était à l’affiche de sa première édition, en janvier 2013. Et aujourd’hui, c’est Picasso, génie incontesté du pinceau, dont on retrouvera aussi une poignée de céramiques conçues sur la Côte d’Azur. De son côté, la SNCF participe à la promotion d’artistes contemporains. Pour la COP21, le sculpteur français Richard Texier (né en 1955) a posté un ours polaire en bronze rouge (7 mètres de haut) devant la Gare du Nord. Le Street artiste Max Tetar est l’auteur de la fresque de 300 m2 qui habille la station Avenue du Président Kennedy, sur la ligne du RER C. Ces installations sur-mesure sont même répertoriées, comme au musée, dans un catalogue d’expositions intitulé « Art en gares ».
3 Place aux experts.
On n’a rien sans rien. La Nuit Blanche et la FIAC comptent parmi les nombreux partenaires de la SNCF. Les artistes sollicités lors de pareilles manifestations sont aussi invités à créer « in situ », c’est-à-dire sur place, dans les gares. Les Aéroports de Paris vont plus loin : le transport des œuvres jusqu’à l’Espace Musées est d’autant plus contraignant qu’elles doivent d’abord passer la douane. Pourtant, le Petit Palais n’a pas hésité à leur céder une partie de ses collections. Comment dire « non », à Serge Lemoine ? L’ex-président du Musée d’Orsay fait partie du comité scientifique des ADP. Et c’est le designer français Hubert Le Gall (né en 1961), responsable d’innombrables décors et parcours artistiques, leur scénographe attitré ! Tous les musées parisiens (Jacquemart-André, le Grand Palais, l’Orangerie…) se l’arrachent ! De quoi rassurer les institutions prêteuses.
4 Tout le monde y trouve son compte.
Si les artistes gagnent ainsi en visibilité, leurs créations redorent le blason des hubs, souvent perçus comme de simples galeries marchandes. M comme « mode » certes, et dorénavant comme « Musée ». Fort de deux expositions par an, le hall M du Terminal 2E n’est plus seulement associé à ses boutiques de luxe mais aussi à l’art. Côté musées, c’est l’occasion soit de prolonger un accrochage, soit de révéler un aspect inédit de leurs fonds. « Ce partenariat avec les ADP nous permet de toucher une clientèle internationale plus large, et de montrer une nouvelle facette de Picasso, à travers des pièces plus ou moins connues », confie Émilie Bouvard, Conservatrice du patrimoine au Musée national Picasso-Paris.
Quoi ?
Picasso Plein Soleil, du 21 janvier au 15 juin, à l’aéroport Paris Charles de Gaulle, en collaboration avec le Musée Picasso.
Et aussi…
- 20 affiches de Camille Lavaud, du 10 janvier 2017 à fin mars, gare Montparnasse et Bordeaux-Saint-Jean.
- Michel Borzoni : Looking for a job et Tim Franco : Metamorpolis, du 21 janvier au 5 mars, Gare de l’Est.