Vive Joséphine, et vive Auguste, respectivement célébrés au Musée du Luxembourg et au Grand Palais. Face a ces commémorations marquées, des commémorations d’artistes (presque) manquées.
Nouvelles condoléances
Il y a 450 ans mourait Michel-Ange…
À Michel-Ange on doit, parmi ses sculptures, le David de l’Académie des Beaux-Arts de Florence (1504), la Pietà de la Basilique Saint-Pierre de Rome (1499) ou le Moïse du Tombeau de Jules II dans la Basilique Saint-Pierre-aux-Liens (1515). C’est encore lui qui orne le plafond de la chapelle Sixtine de 1508 à 1512, ainsi que Le Jugement denier, inspirée de la fresque de Melozzo da Forlì (1536-1541). Comme pour tout génie, on s’attend à une pléthore de festivités en son honneur. Or le maître toscan est mort le 18 février 1564, à Rome. La France aurait-elle manqué l’occasion de célébrer son talent ? Oui et non. À part une exposition aux Beaux-arts de Paris sur Antoine-Louis Barye, « Le Michel-Ange de la Ménagerie » (22 cotobre 2013-31 janvier 2014), et le dernier roman d’Alain Le Ninèze Libica Michel-Ange et la Sibylle, paru le 12 mars chez Actes Sud, rien de renversant.
On se console en pensant que Michelangelo di Lodovico Buonarroti Simoni était italien. C’était donc à la Botte de lui rendre hommage. Mieux vaut tard que jamais car l’exposition « 1564-2014 Michelange » n’ouvre ses portes que le 28 mai, au Capitole. Un événement tant attendu qu’il fallait bien entendu lui faire de l’ombre. À croire que la culture ne mérite pas sa place dans l’actualité. Circule pourtant en ce moement sur les ondes italiennes, une publicité montrant le David de Michel-Ange armé d’un fusil et soutenant le slogan « AR-50A1, une œuvre de art ». Quel jeu de mots ! Ainsi l’Arma Lite, une société américaine basée dans l’Illinois, parvient à souiller le nom du sculpteur. C’est à se demander, pour lui, si pareil outrage valait mieux que l’oubli ?
LIVRE : Alain Le Ninèze, Libica Michel-Ange et la Sibylle, 12 mars 2014, Actes Sud
EXPO : “1564-2014 Michelange”, 28 mai au 14 septembre, Musée du Capitole, Rome
Il y a 400 ans mourait El Greco
À Paris… nada, c’est-à-dire rien (en espagnol) pour honorer la mémoire de Domínikos Theotokópoulos, dit El Greco ! Quoi de mieux, en effet, qu’une exposition au musée de Santa Cruz de Tolède, pour célébrer le quadricentenaire de sa disparation ? C’est là que l’artiste a peint Le Partage de la tunique du Christ (El Espolio) (1577-1579), sa toute première commande espagnole, et La Vue de Toléde sous l’orage (1596-1600), « le meilleur tableau du Musée [le MET] », d’après Ernest Hemignway ; là également qu’il a rendu son dernier souffle, le 7 avril 1614. 64 œuvres venues de 31 villes différentes, sans compter les pièces issues des collections espagnoles, c’est-à-dire 300 oeuvres au total ont été réunies au sein de « la plus grande rétrospective jamais consacrée au peintre », dixit Grogorio Marañon, le président de la Fondation El Greco 2014. Et en Grèce alors ? N’oublions pas que l’artiste était crétois. Pas de trace de manifestations majeures.
Heureusement, le musée de Picardie invite ses visiteurs à redécouvrir son « Portrait d’Homme », mis en valeur en attendant la réouverture de ses « salles de peintures ». Quant au Louvre, il se propose de souligner le rayonnement du maître en France dans le cadre d’un (premier ?) colloque, fin mars. Parmi les invités, Guillaume Kientz qui reviendra sur l’actualité des tableaux de Greco, Jeongho Park, de la New York University, chargé de gloser sur le Portrait de Vincenzo Anastagi, et Javier Barón du musée national du Prado, entre autres. Quel casting !
EXPOSITION : “El Griego de Toledo” , du 14 mars au 14 juin, du 24 juin au 5 octobre
COLLOQUE : “Greco et la France”, 29 mars, au Louvre
Heureux événements
Il y 200 ans naissaient Eugène Viollet-le-Duc et Jean-François Millet…
Connu pour ses restaurations et constructions médiévales, Eugène Viollet-le-Duc est né le 27 janvier 2014. Qui s’en est souvenu, cette année ? Le département de l’Oise, où l’architecte effectua le plus gros de son travail, et plus particulièrement le château de Pierrefonds, ancienne forteresse des comtes de Valois rénovée par Viollet-le-Duc à la demande de l’empereur Napoléon III. Parmi les autres accomplissements de l’artiste, la flèche de Notre-Dame de Paris conçue sur modèle de celle de la cathédrale d’Orléans, et la basilique Sainte-Marie-Madeleine de Vézelay, en Bourgogne. Aucunes festivités annoncées dans cette région.
Quant à Jean-François Millet – prononcé « Milet » et non « Miyet » -, il voit le jour le 4 octobre 1814, à Gréville-Hague, en Basse Normandie. L’un de ses tableaux les plus célèbres, Les Glaneuses (1857), repose au musée d’Orsay. Pour célébrer le bicentenaire de sa naissance, une série de manifestions se profile au sein de la maison-atelier de Théodore Rousseau, ami fidèle de l’artiste. La première, une lecture de textes par l’acteur français Patrice Préjean, a eu lieu le 9 mars. La suivante se déroulera le 11 mai prochain. Il s’agit d’un atelier en plein air intitulé « Croquis de printemps dans la plaine de Bière ». À venir en juin et octobre, deux autres événements aux contours encore flous. Orsay devrait aussi être de la partie. En attendant, rien n’empêche de visiter l’atelier du peintre à Barbizon (27 rue Grande, 77630).
ATELIER : « Croquis de printemps dans la plaine de Bière », le 11 mai, à la maison-atelier de Théodore Rousseau.
À VENIR : la programmation de la maison-atelier de Théodore Rousseau et du musée d’Orsay.
Il y a 150 ans naissaient Henri Toulouse-Lautrec et Camille Claudel…
Fils du comte Alphonse de Toulouse-Lautrec Monfa, un noble de province, bébé Henri pousse son premier cri le 24 novembre 1814, à Albi. Atteint très jeune de pycnodysostose, il finit par se fracturer les deux jambes. Un accident qui, conjugué à sa maladie, arrête sa croissance à 1,52m. On lui prête un léger zozotement et un penchant certain pour l’alcool. Son bac en poche (au rattrapage), il décide de devenir peintre. Habitué des cabarets, dont le fameux Moulin Rouge, il représente aujourd’hui l’un des piliers du post-impressionniste. Il y a à peine quelques jours, le Théâtre Musical de Pibrac retirait de l’affiche « La maison Lautrec », une pièce de Gilles Ramade exclusivement dédiée – comme son nom l’indique – à celui que l’on surnommait « l’âme de Montmartre ». Au même moment s’ouvrait au musée Angladon d’Avignon l’exposition « Toulouse-Lautrec et le spectacle ». Toutefois, la manifestation la plus attendue demeure celle que concocte pour la rentrée 2014 le musée d’Albi, ville natale du peintre ; une exposition mettant au jour la relation qu’entretenait ce dernier avec Maurice Joyant, son ami et protecteur.
EXPOSITION : “Toulouse-Lautrec et le spectacle”, du 21 mars au 15 juin, au musée Angladon, Avignon.
Pour une fois que les commémorations ont de l’avance ! Camille Claudel est née le 8 décembre 1864. Ce qui n’a pas empêché le musée Rodin de mettre 22 de ses œuvres en avant, dès le 1er octobre 2013. C’était en réalité pour le soixante-dixième anniversaire de la mort de l’artiste. Quelques mois après la fin de cet événement, début janvier, paraissait chez Gallimard la troisième édition de ses correspondances, une édition augmentée de 36 lettres au marchand et critique d’art belge Léon Gauchez. Élève et maîtresse d’Auguste Rodin, la jeune femme n’était autre que la sœur du célèbre écrivain et diplomate Paul Claudel, le même qui encouragea son internement psychiatrique en 1913. Écrasée par ces deux monstres de talent et d’égoïsme, la jeune femme ne connut de réel succès, si ce n’est après sa disparition. Une injustice que tend à compenser la construction, à Nogent-sur-Seine, d’un musée à l’effigie de l’artiste maudite. Prévue pour le printemps 2014, l’ouverture du monument précède le cent-cinquantenaire de la naissance de la sculpteur. Un retard est vite arrivé. Mieux valait donc prévenir que guérir.
LIVRE : Anne Rivière et Bruno Gaudichon, « Camille Claudel Correspondance » 3ème édition, Art et Artistes Gallimard.
EXPO : mai 2014, ouverture d’un musée Camille Claudel à Nogent-sur-Seine.